Par Henri
A l’occasion de sa Bar Mitsva, paracha Ki Tetsé 5784
Bonjour à toutes et à tous, chères famille et amis, merci d’être venus pour ce jour important qu’est ma Bar Mitsva. Aujourd’hui je vais vous lire ma dracha, le fruit de mon travail sur l’année qui s’est écoulée.
Je vais vous parler plus précisément d’une Mitsva qui m’a beaucoup intriguée. Cette mitsva dit:
כִּ֣י יִקָּרֵ֣א קַן־צִפּ֣וֹר ׀ לְפָנֶ֡יךָ בַּדֶּ֜רֶךְ בְּכׇל־עֵ֣ץ ׀ א֣וֹ עַל־הָאָ֗רֶץ אֶפְרֹחִים֙ א֣וֹ בֵיצִ֔ים וְהָאֵ֤ם רֹבֶ֙צֶת֙ עַל־הָֽאֶפְרֹחִ֔ים א֖וֹ עַל־הַבֵּיצִ֑ים לֹא־תִקַּ֥ח הָאֵ֖ם עַל־הַבָּנִֽים׃
שַׁלֵּ֤חַ תְּשַׁלַּח֙ אֶת־הָאֵ֔ם וְאֶת־הַבָּנִ֖ים תִּֽקַּֽח־לָ֑ךְ לְמַ֙עַן֙ יִ֣יטַב לָ֔ךְ וְהַאֲרַכְתָּ֖ יָמִֽים׃
Ce Qui veut dire littéralement :
“Si tu rencontres en ton chemin un nid d’oiseaux sur quelque arbre ou à terre, de jeunes oiseaux ou des œufs sur lesquels soit posée la mère, tu ne prendras pas la mère sur sa couvée : tu es tenu de laisser
envoler la mère, sauf à t’emparer des petits ; de la sorte, tu seras heureux et tu verras se prolonger tes jours.”
A première vue, ce texte peut sembler incompréhensible : pourquoi parler en particulier d’oiseau ? Pourquoi ne peut-on pas prendre la mère avec ou encore pourquoi est-il écrit “la mère sur sa couvée ?”
Ecoutons d’abord ce qu’en pensent les commentateurs sur cette mitsva, en particulier deux grands philosophes juifs du Moyen-Age : Maïmonide et Nachmonide:
Maimonide pensait que cette mitsva nous apprenait à ne pas agir cruellement, car pour une mère, il n’y a pas de pire horreur que de voir sa progéniture mourir devant ses yeux, qu’elle soit un animal ou un être humain.
Nahmanide, lui, interprétait ce texte plutôt comme un moyen de dire qu’il ne faut pas détruire une espèce entière. En laissant la mère s’envoler, on permettrait à la mère de s’enfuir, puis refaire une famille, préservant ainsi l’espèce. Nahmanide était probablement le premier écolo de l’histoire de l’humanité!
Cependant, les interprétations de ces deux grands sages ne répondent pas à toutes les
questions posées juste avant :
-Elles n’expliquent toujours pas pourquoi on parle d’oiseau. Pourquoi pas une girafe ?
-L’utilisation de la préposition “sur” dans “tu ne prendras pas la mère sur sa couvée” reste incompréhensible. Ne devrait-on pas écrire “avec sa couvée” si on suit l’idée de Nahmanide ou “devant sa couvée” si on suit l’idée de Maïmonide ?
-Mon enquête sur le verset m’a permis de questionner davantage.
-Mais aussi pourquoi sommes-nous récompensés après l’accomplissement de la mitsva ?
Maintenant, laissez-moi vous montrer comment moi j’interprète cette loi :
En essayant de faire des liens avec d’autres prescriptions, je suis tombé sur une autre ayant la même récompense de longévité:
כַּבֵּ֥ד אֶת־אָבִ֖יךָ וְאֶת־אִמֶּ֑ךָ לְמַ֙עַן֙ יַאֲרִכ֣וּן יָמֶ֔יךָ עַ֚ל הָאֲדָמָ֔ה אֲשֶׁר־יְהֹוָ֥ה אֱלֹהֶ֖יךָ נֹתֵ֥ן לָֽךְ׃
“Honore ton père et ta mère afin que tes jours se prolongent sur la terre que l’Éternel ton Dieu t’accordera.”
Pourquoi ces deux prescriptions ont-elles la même récompense ?
Pour bien comprendre le lien caché entre les deux, il faut revenir à la création du monde;
Au commencement, Dieu donna la capacité de voler aux oiseaux, leur permettant de se
protéger en cas de danger.
Mais alors, pourquoi ordonne-t-on dans faire renvoyer la mère si elle est capable de se
protéger en s’envolant ?
Parce que quelque chose la retient sur terre. Quelque chose qui l’empêche de s’enfuir si un danger se présente devant son nid. Cette chose, c’est son amour maternel pour ses enfants.
Voilà pourquoi il était écrit “sur” la mère et non pas avec. Le choix de l’oiseau pour cette mitsva était sans doute le plus adéquat, car un oiseau possède un système de défense infaillible et donc cette position de faiblesse pour protéger ses enfants alors qu’elle pourrait s’enfuir montre bien à quel point une mère est prêt à tout pour protéger ses enfants. Cette interprétation de la mitsva est renforcée dans un passage de la Torah racontant l’histoire de Jacob.
Cette mitsva était donc depuis le début une explication de pourquoi on doit honorer ses
parents. Nous devons les vénérer, les honorer car on ils nous aiment, inconditionnellement et sont prêt à tout pour nous protéger. Voici ma vision juive de la mère !