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Terouma: construire son temple intérieur

Dracha prononcée par Sacha, à l'occasion de sa Bar Mitvsa le 15 février 2024

Par Sacha

Bonjour à tous, 

Aujourd’hui, nous avons lu la paracha Terouma… mais, comme je trouvais qu’étudier une seule paracha c’est pour les faibles, je me suis aussi intéressée à la paracha Michpatim dans laquelle sont énoncées un grand nombre de lois. 

En fait, le rabbin m’a confié un petit challenge: faire un lien entre ces deux parachas qui se suivent… 

Terouma donne les règles précises de la construction du Michkan, c’est-à-dire le temple portatif, aussi appelé “tabernacle” (et non, ce n’est pas une blague canadienne !) que les hébreux ont construit pour abriter les tables de la loi et pratiquer le culte lorsqu’ils étaient encore dans le désert. 

C’était donc un temple fait de tissu comme une très grande tente qu’ils pouvaient déplacer régulièrement. 

Petit rappel des faits: 

Les 10 commandements ont été donnés après le récit de la sortie d’Egypte. De ces dix commandements découlent de nombreuses autres lois sur à peu près tous les sujets et dont certaines posent de sérieuses questions…

On trouve par exemple dans la paracha Michpatim une loi qui dit qu’il faut condamner à mort le fils rebelle… heureusement que cette loi n’est plus appliquée aujourd’hui sinon je pense que ni moi ni mes frères n’aurions atteint l’âge de la Bar Mitsva!

Ensuite, la Torah donne des instructions précises pour la construction du lieu qui servira à garder précieusement cette loi et la mettre en pratique: c’est le Mickhan, dont on nous parle dans Terouma.

Je cite le texte:

Et ils feront pour moi un sanctuaire, et j’habiterai au milieu d’eux.” (Ex.2 8-9)

Pourquoi Dieu a-t-il besoin d’un endroit où habiter? J’ai toujours entendu dire que Dieu est partout, je doute qu’il ait besoin d’une maison…

Pour mieux comprendre, il faut regarder la traduction d’André Chouraqui: 

Faites-moi un sanctuaire et je demeurerai en leur sein

En leur sein” c’est-à-dire “en eux”.  On comprend donc en regardant de plus près le sens des mots en hébreu qu’en réalité le sanctuaire n’est pas une “maison pour Dieu”, mais plutôt un moyen pour les hommes de se rapprocher de lui.

En se construisant un lieu pour “pratiquer” leur culte, les hébreux peuvent s’améliorer et permettre à la présence divine d’habiter en eux.

La loi doit transformer les hommes pour que Dieu puisse habiter dans leurs coeurs. En fait, édifier le Temple c’est aussi et surtout se transformer soi-même. On retrouve cette idée clairement énoncée dans un des offices de Yom Kippour, le service de la “avoda” qui rappelle les gestes du grand prêtre dans le Temple au moment de Kippour. Il s’agit d’une prière pour la reconstruction du Temple de Jérusalem, je cite le Mahzor (p.296 97): 

« Mon Dieu, je sais que je ne peux contribuer à cette reconstruction que si je construis au préalable en moi ce sanctuaire, que si je remporte sur moi-même une victoire morale en combattant de toutes mes forces les mauvais penchants (…) maintes fois j’ai réuni les matériaux pour édifier le sanctuaire que Tu veux construire en moi (…) mais souvent j’ai été arrêté par ma paresse, par ma lâcheté devant l’effort nécessaire »

Chaque Kippour nous rappelle que c’est un travail difficile…

Mais la grande question, c’est donc: comment fait-on pour se transformer soi-même? 

Pour ce qui est de la construction du Temple, nous avons dans Terouma un mode d’emploi plus détaillé qu’un mode d’emploi Ikéa 🙂  rien n’est laissé au hasard, ni les dimensions, ni les matériaux à utiliser, ni même la couleur des rideaux, tout a été prévu dans les moindres détails!

Si il y avait un mode d’emploi aussi précis pour construire son “temple intérieur” ce serait pratique mais je pense que les humains sont un peu plus complexes que les bâtiments ou les armoires…

La clé, à mon avis, c’est dans le mot “pratique”. C’est en “pratiquant” les mitsvot, en mettant en “pratique” cette loi que l’on peut s’améliorer. Vous allez me dire que je ne pense qu’à ça mais, moi tout ça me fait penser au foot. Je vous entends déjà dire “non même le jour de sa BM il pense encore au foot!”… bah oui, désolée…

En sport aussi il faut « pratiquer » pour s’améliorer. Et plus on pratique, plus on s’améliore! 
C’est un chemin continu car on peut toujours se perfectionner, devenir meilleur. On sait que la perfection n’existe pas dans le sport, qu’il aura toujours plus fort que soi, toujours un record à battre. Il faut aller sur le terrain et avoir cette envie constante de s’améliorer.

Pour la Torah, c’est un peu pareil, être juif mais ne jamais mettre les pieds à la synagogue, réciter le Chema ou ne faire aucune mitsva risque de nous éloigner du… « but » (oui encore désolé pour l’expression, je ne peux pas m’en empêcher!), le but de tout cela: se transformer soi-même, devenir une meilleure personne. 

On pourrait même aller plus loin dans la comparaison avec le foot. Car dans la pratique du foot comme dans la Torah, il y a des lois, des règles. Sans ces lois, rien n’est possible! 

Moïse a reçu les tables de la loi et ce sont ces lois qui constituent l’identité du peuple juif. Le fait d’adhérer à un même ensemble de règles et valeurs. Sans elles, rien n’est possible… comme en sport! Sans règle du jeu, pas de jeu. Imaginez un peu le chaos sur le terrain si tous les coups étaient permis…

Comme les joueurs de foot ont besoin de règles, nous avons besoin de notre loi, notre Torah. Elle est notre guide. Si je n’avais pas passé toutes ces heures à « pratiquer », c’est à dire à étudier a paracha, je serais quand même considéré comme « Bar Mitsva » après avoir eu 13 ans… mais je réalise que pour vraiment comprendre ce que tout ça représente, pour avancer, c’est essentiel de pouvoir m’appuyer sur tous ces éléments: 

  • une Torah qui est notre règle du jeu
  • une communauté qui est notre équipe
  • et d’avoir un « terrain », un lieu pour que cette communauté puisse se rassembler, car en plus du mishkan intérieur, il faut un mishkan réel, c’est à dire un lieu où pratiquer. Pour nous, juifs modernes, ce « terrain » est aujourd’hui notre synagogue.

Ce sont tous ces éléments qui nous permettent de faire vivre le judaïsme et de devenir des meilleures personnes, c’est-à-dire construire notre « temple intérieur ». 

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